Des allégations graves de corruption et de malversations financières entourent Aminata Germer, coordinatrice du programme Démocratie Sans Violence – Baïonnette Intelligente (DSV BI), une initiative conjointe de deux projets lancés en 2007 en Guinée. Des informations troublantes, parvenues à la rédaction d’avenirguinee.org, révèlent des pratiques de détournement de fonds, d’enrichissement illicite et une gestion autoritaire de la part de Madame Germer, une citoyenne guinéenne naturalisée allemande, nommée à la tête de la DSV BI en tant que représentante du pays pour le WFD en Septembre 2022. Ces accusations sont-elles fondées ? avenirguinee.org a pu avoir la réaction de madame Aminata Germer, qui rejette catégoriquement toute implication dans des activités répréhensibles, affirmant qu’il s’agit d’une tentative de nuire à sa réputation. Ci-dessous, questions-réponses-
Avenirguinee : Selon nos informations, vous avez réduit les financements destinés aux organisations locales partenaires au projet, piétinant ainsi les objectifs de la DSV BI. C’est par exemple quelques organisations comme la CNPG et la PNJDD. Cette décision qui émane de vous aurait permis d’engranger plus de 300 millions de francs guinéens. Quelle est votre réponse à cela ?
– Réponse de Mme Michaela Balke de WFD, avant celle de Mme Aminata Germer :
Merci de nous donner l’occasion de réagir aux accusations calomnieuses portées contre notre collaboratrice, Mme Germer, et contre notre programme en Guinée, qui sont apparues ces dernières semaines sur certaines plateformes de presse guinéennes.
Au cours des derniers mois, le Service Mondial de la Paix (WFD) a entrepris une restructuration du programme, qui était nécessaire et planifiée de longue date. Madame Germer agit en étroite concertation et en échange continu avec le siège du WFD à Berlin. Les changements opérés ne sont donc pas le fruit de ses décisions personnelles, mais d’une démarche planifiée par l’ensemble de l’organisation. Nous sommes très satisfaits de la mise en œuvre de cette restructuration et sommes convaincus que le programme et la collaboration avec nos partenaires CNPG et PNJDD – et éventuellement avec d’autres partenaires à l’avenir – n’ont un bon avenir en Guinée qu’avec des changements.
Cette restructuration était nécessaire en raison
du budget désormais réduit de notre programme en Guinée,
des coûts fixes relativement élevés (pour un nombre élevé de collaborateurs au bureau central et sous forme de bureaux extérieurs avec divers frais annexes du programme national),
des départs à la retraite à venir et
des fonctions en partie modifiées des collaborateurs.
Avenirguinee : Vous auriez préféré utiliser les fonds destinés au projet pour acheter une voiture de luxe. Quelles sont vos motivations à cet égard ?
Dr GERMER Aminata de WFD : Il est exact qu’une voiture de service a été achetée pour l’usage professionnel de la Coordonnatrice et pour le projet. Pour cet achat, plusieurs offres ont été demandées à des fournisseurs de Conakry. Nous avons également demandé conseil à l’ambassade d’Allemagne et à un grand prestataire de services de la coopération internationale pour le développement durable et l’éducation internationale. Le véhicule choisi est un véhicule tout-terrain courant, comme ceux utilisés par d’autres organisations de coopération internationale. Deux des véhicules du projet achetés en 2015 et 2017 ont été vendus en raison de réparations constantes.
Avenirguinee : Concernant le nouveau siège du projet, vous êtes accusée d’avoir choisi une villa plus coûteuse que l’ancien siège. Une villa à un étage avec un loyer mensuel de 10 000 000 GNF soit 1 074,00 Euro par mois contre 4 000 000 GNF soit 430 Euro de loyer mensuel que le projet payait à l’ancien siège. Pour la viabilisation de ce nouveau bâtiment, une somme de colossale de loyer pour 12 mois soit 120 000 000 GNF équivalent à 12 869 Euro, aurait été décaissée. Sans compter les faits de réinstallation qui ont couté des millions de fg. Quelle justification donnez-vous à cela ?
Dr GERMER Aminata de WFD : La location d’un bureau plus grand fait partie de la restructuration décrite ci-dessus. Deux autres bureaux ont été fermés à Conakry. L’un d’entre eux était situé dans un quartier défavorisé, ce qui représentait un risque permanent pour la sécurité du personnel, et l’autre était trop grand et mal situé. Dans l’ensemble, les coûts de loyer, de frais courants et de gardiennage sont ainsi économisés. Sans l’avance de loyer de 12 mois, le bureau aurait été attribué à d’autres candidats. En 2024, les frais de location seront donc moins élevés. Il ne s’agit pas d’une dépense supplémentaire, mais d’un simple paiement anticipé. La location de ce bureau est le résultat d’une longue étude de marché menée en équipe avec l’ancienne coordination du programme et en concertation avec le WFD en ce qui concerne le prix, la sécurité, l’emplacement et l’approvisionnement en eau et en électricité. Il ne s’agissait pas d’une décision prise par la seule coordinatrice.
Avenirguinee : Vous auriez fait venir des cabinets étrangers pour des formations, malgré la priorité accordée aux cabinets nationaux dans les contrats. Pourquoi ce choix ?
Dr GERMER Aminata de WFD : Nous avons retenu recruté des cabinets de formation en équipe avec des responsables de formation du programme, expérimentés de longue date, et par un formateur du CNPG pour l’appel d’offres et la sélection. Lors de la sélection, des cabinets guinéens avec des employés guinéens et des cabinets guinéens avec des employés guinéens et étrangers ont été pris en considération.
Dans le passé, le programme a rarement organisé des appels d’offres pour le recrutement de personnel, mais cela devrait devenir de plus en plus la norme à l’avenir, comme dans d’autres ONG. Cela permettra d’augmenter la transparence dans le recrutement du personnel ainsi que la qualité et la diversité du personnel issu de différentes régions du pays au sein de l’équipe à l’avenir.
Avenirguinee : On vous soupçonne des dépenses douteuses liées à la consommation ou au dédouanement des voitures du projet. Également, on vous accuse d’avoir fait décaisser à l’aide de votre transitaire, un certain capitaine de douane et directeur de la société de transit SOCIETE DEN NASENKO BIRAMA SARLU, un montant de 283 857 679 GNF soit 30 480 Euro. Un flou autour d’un 217 227 738 GNF soit 23 325 Euro persiste. Pouvez-vous clarifier ces soupçons ?
Dr GERMER Aminata de WFD : Il faut noter que les trois véhicules du projet ont été immobilisés en août/septembre 2023 par les autorités douanières guinéennes, car une conversion d’une immatriculation temporaire des véhicules en une immatriculation permanente devait être effectuée. Les coûts de cette immatriculation ont été fixés par les autorités douanières guinéennes. Ils incluent également les pénalités des taxes non payées depuis 2018 pour les trois véhicules. Je ne travaillais pas encore dans le programme à ce moment-là. Un agent (« Transitaire ») a été mandaté pour effectuer les paiements aux autorités douanières et fiscales, comme c’est généralement le cas en Guinée. La question de savoir où se trouve la « preuve de destination finale », c’est-à-dire le justificatif de paiement entre le « Transitaire » et les autorités guinéennes, reste en effet ouverte.
Le WFD a donc chargé un avocat en Guinée d’enquêter sur place sur cette affaire. Il est en contact avec les autorités compétentes et la justice. Après avoir examiné la documentation relative au dédouanement et au paiement des taxes des trois véhicules du projet, l’avocat a constaté que j’avais agi correctement dans ce processus. Il s’attend à ce que cela soit également confirmé par la justice guinéenne. Il reste à clarifier le sort des justificatifs entre les autorités douanières et le « Transitaire ».
Avenirguinee : Pourquoi seules trois des 22 activités planifiées pour l’année 2023 sont-elles été réalisées ?
Dr GERMER Aminata de WFD : Le taux de réalisation des activités était effectivement plus bas que d’habitude, mais pour 2024, cela devrait changer grâce à la restructuration du programme décrite ci-dessus.
Outre les coûts fixes élevés, l’augmentation des prix ainsi que la détérioration du taux de change ont entraîné une hausse des coûts des activités. L’ampleur des coûts de certaines activités avait tout simplement été sous-estimée lors de la planification pour 2023.
Avenirguinee : Qu’est-ce qui a motivé la fermeture des bureaux dans les régions de Labé, Kankan, NZérékoré, Kindia et Boké.
Dr GERMER Aminata de WFD : Dans le cadre de la restructuration, au lieu de structures fixes sous forme de bureaux, des activités de traitement de la paix et des conflits orientées vers des résultats seront planifiées et réalisées par les partenaires dans des lieux choisis. Des locaux continueront d’être financés en cas de besoin, mais en fonction des événements. Dans l’ensemble, cela permet aux partenaires d’être plus autonomes et favorise la durabilité du programme.
A suivre…
Mohamed Cissé pour avenirguinee.org