En Guinée, les éboulements miniers constituent l’un des phénomènes les plus meurtriers après les accidents de la route, avec plus de 400 cas recensés au cours de l’année 2022.
Comment les responsables de l’Union Nationale des Orpailleurs de Guinée (UNOG) perçoivent-ils ce problème et quelles sont leurs demandes pour y mettre fin ? Quelles solutions peuvent être envisagées pour éviter ces incidents dans nos zones minières ? Ces questions ont été posées ce lundi au 3ème vice-président de l’UNOG, M. El-hadj Moussa Sakoba Keita, également porte-parole de l’organisation. Interview…
Récemment, un éboulement s’est produit le mercredi 3 avril 2024 dans la mine d’or de Boudanin, située entre les districts de Léro et d’Amina, faisant 5 morts sur place. En tant qu’acteur minier, quel est votre ressenti face à ces tragédies récurrentes ?
Tout d’abord, au nom de notre équipe, je tiens à vous remercier pour votre visite et exprimer nos sincères condoléances aux familles touchées par ces éboulements. Depuis l’arrivée de M. Tiane Koita à la tête de l’UNOG, nous travaillons sans relâche pour que ces incidents appartiennent au passé. Cependant, force est de constater que les éboulements continuent de causer des victimes parmi les orpailleurs. La seule solution viable pour contrer ce fléau est d’accélérer le processus de mécanisation. Nous collaborons avec le ministère des Mines pour mettre en œuvre cette transition vers une exploitation plus mécanisée et ainsi éviter de nouvelles pertes humaines.
Depuis votre prise de fonction, quelles actions avez-vous entreprises dans ce sens, étant donné que ces incidents sont devenus plus fréquents ces derniers temps ?
Il y a environ deux mois, avant le changement de gouvernement, l’ancien ministre des Mines avait lancé les démarches pour concrétiser ce projet de mécanisation. Nous avons même visité ensemble le site pilote à Tinkoba. Malheureusement, avec l’arrivée du nouveau ministre, nous sommes dans l’attente de voir comment ce projet sera poursuivi. Toutes les études ont été réalisées et des partenariats ont été conclus entre le ministère des Mines, le ministère de l’Environnement et l’UNOG pour concrétiser cette mécanisation.
Selon vous, quelles sont les causes fondamentales de ces éboulements ?
Les géologues pourront vous fournir une explication scientifique, mais en tant que praticiens, nous attribuons ces éboulements à un mauvais comportement des mineurs. Certaines zones ne doivent pas être exploitées, mais lorsque cela est fait, cela entraîne une surcharge qui provoque l’effondrement. La mécanisation est la seule solution pour prévenir ces incidents à l’avenir.
Quelles propositions faites-vous pour éviter ces drames à l’avenir, sachant que vous êtes un expert dans ce domaine ?
Notre proposition à l’État est simple : étant donné que l’orpaillage contribue de manière significative à l’économie guinéenne, l’État doit prendre en charge nos préoccupations. Nous ne faisons pas cette demande uniquement pour nous-mêmes, mais pour l’ensemble de la nation guinéenne. Nous demandons à l’État de prendre des mesures concrètes, telles qu’un décret présidentiel, pour accélérer le processus de mécanisation. Cela doit être une priorité absolue, car chaque perte humaine est une tragédie pour notre pays.
Pensez-vous que ces mesures seront respectées sur le terrain, sachant que certains mineurs sont habitués aux méthodes manuelles ?
La population est en grande partie favorable à cette évolution. Nous devons passer à une nouvelle ère, et la semi-mécanisation est un premier pas vers cet objectif. Nous devons nous unir en tant que Guinéens pour créer des sociétés minières dignes de ce nom. L’État doit nous accompagner dans cette transition pour que nous puissions réellement progresser.
Pourquoi Siguiri est-elle la préfecture la plus touchée par les éboulements en Guinée ?
Siguiri est le principal producteur d’or en Guinée, avec plus de 70 % de la production nationale. La préfecture compte plus de 1000 sites d’extraction d’or, ce qui explique le nombre élevé d’incidents.
Quel message souhaitez-vous adresser aux familles des victimes et à l’État suite à ces tragédies ?
Nous remercions le gouvernement pour son attention portée à notre secteur, mais nous appelons à des actions concrètes et rapides. Nous ne pouvons plus tolérer de nouvelles pertes humaines. La mécanisation doit devenir une réalité dès maintenant pour éviter de nouveaux drames.
Réalisée par Ibrahima Sory Camara pour avenirguinee.org