Volontairement engagées à nettoyer la Grande mosquée fayçal depuis sa construction, des femmes balayeuses de cette maison de Dieu prennent la parole. Au micro d’avenirguinee.org, elles se sont exprimées sur leurs conditions qui laissent à désirer depuis de nombreuses années. Pas soutenues, ni accompagnées, elles déplorent le fait qu’elles soient ignorées par tous les régimes de 1984 à 2023.
Hadja Yarie Soumah, une des balayeuses, a raconté sa situation. « Depuis 1984 je suis en train de nettoyer ici mais, jusqu’à présent, je n’ai rien bénéficié, même un morceau de savon. Je travaillais à la Pharma-Guinée (Pharmacie Centrale de Guinée PCG). Mais, avant d’y aller, je pense à la mosquée. On puisait de l’eau dans la forêt pour venir laver la mosquée ici. Beaucoup d’associations nous ont trouvé ici et certaines sont parties. Si le gouvernement fait du bien, nous on ne connaît pas. On entend qu’ils ont envoyé le riz pour les travailleurs ici mais, nous, on ne voit pas, ils en ont pris certaines parmi nous pour les agréer, celles-ci sont dans la fonction publique aujourd’hui », dit-elle.
Visiblement déçues du traitement qui leur est accordé, elles ont interpellé le colonel Mamadi Doumbouya, président de la transition.
» C’est ici que toutes les grandes personnalités viennent prier. Elles trouvent que la Mosquée est propre mais, personne ne pense à nous les pauvres femmes. Depuis le temps de Sékou Touré jusqu’à Mamadi Doumbouya, personne. Pourtant on quitte loin pour venir ici nettoyer avec nos propres moyens (transport, savons…) mais, personne ne nous aide ici. C’est une déception pour nous aujourd’hui de nous voir ignorés par tout le monde.
Nous voulons que le colonel Mamadi Doumbouya nous aide, nous sommes des mères de famille veuves, pour ne pas qu’on meurt sans manger, sans bénéficier du bonheur de cette patrie. J’ai mes 85 ans cette année. Pendant les fêtes, nous avons besoin d’uniformes mais, on ne gagne pas. Quand nous partons à la ligue, ceux-ci nous disent que c’est pour eux qui sont là. C’est Aly Jamal (ex ministre secrétaire général des affaires religieuses) qui nous donnait des dattes pendant le ramadan plus le riz. Ce n’est pas le gouvernement qui nous a envoyées ici, nous sommes venues de nous-mêmes. Chaque jour je quitte à Hèrèmakono (Matoto) pour venir ici. Mamadi Doumbouya n’a qu’à faire face à nous les travailleuses de la mosquée Fayçal », lance cette femme.
Dans la même lancée, la présidente des veuves balayeuses de cette Mosquée, N’Sira Camara a confié que cela fait 20 ans qu’elle vient balayer cette maison de Dieu. » On n’a pas été prises en charge par les autorités, tout ce que nous faisons, nous le faisons à cause de Dieu. Comme on a un bon chef, quand il vient, il nous parle bien. Peut-être avec son aide Dieu va nous aider. Depuis le régime de Sékou Touré nous sommes là, on ne gagne pas de savons, ni de nourritures, nous ne gagnons rien. J’ai mes papiers de la Mecque ici mais, jusqu’à présent je n’y suis pas allée ».
Á l’issue des démarches qu’elles ont menées, ces balayeuses ont obtenu du premier ministre la promesse de les assister. Malheureusement, elle n’est jusque-là pas réalisée.
» Le premier ministre a dit qu’il nous a entendu, qu’il va voir comment nous aider. Mais, on continue d’attendre cette aide qui retarde. Chaque jour je paye le transport de Bonfi jusqu’ici et je me retourne des fois au crépuscule. C’est nous qui balayons et lavons la mosquée. Ce que j’ai à dire au président Mamadi Doumbouya, il n’a qu’à nous reconnaître, nous sommes sa maman, sa grand-mère, de prendre nos problèmes à deux mains… ».
Á suivre
Ibrahima Sory Camara pour avenirguinee.org
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