Les langues se délient ces derniers temps autour du récent décret du Président de la Transition relatif à la nomination des chefs de quartiers et districts par les Gouverneurs des régions administratives du pays.
Pour certains, cet acte du pouvoir central enfreint les dispositions du code électoral révisé en date du 24 février 2017 par la 8ème législature de l’Assemblée nationale. L’article 99 dudit Code mentionne que la désignation des membres du Conseil de district ou de quartier est faite au prorata des résultats obtenus dans les districts et quartiers par les listes de candidature à l’élection communale.
Est-il besoin de rappeler que cette disposition de ce code adopté au forceps par les acteurs politiques à l’époque, n’a jamais été appliquée. Son adoption visait à satisfaire des appétits politiques que d’efficacité sur le terrain.
Il est de notoriété publique de changer des règles en désuétude pour le bon fonctionnement d’une entité. Ne dit-on pas que la folie, c’est de faire toujours la même chose et de s’attendre à un résultat différent ?
Aujourd’hui, dans l’élan de la refondation et de la rectification institutionnelle, le CNRD sous le leadership du Colonel Mamadi DOUMBOUYA entend aller vite et bien.
Ce décret vient donc corriger une anomalie dans la gouvernance locale. Son application va rapprocher davantage l’administration déconcentrée, des citoyens.
Dans les faits, les districts et quartiers restent des entités administratives locales qui sont responsables de la gestion des affaires publiques à l’échelle locale. Et le décret prévoit des critères auxquels obéit la désignation des membres des conseils de quartier et district. D’importantes précisions ont été également apportées par le Ministre de l’Administration du territoire et de décentralisation, quant au processus inclusif de la démarche, notamment le recueil d’un nombre important de signatures avant toute validation de candidature.
Mieux, les collectivités décentralisées sont aujourd’hui administrées par des exécutifs communaux en fin de mandat. Déjà, des délégations spéciales sont en train d’être installées en vue de corriger cet état de fait. Pourquoi ne pas étendre ce renouvellement aux quartiers et districts. Des défaillances institutionnelles chroniques ont conduit à la prise du pouvoir par le CNRD. La responsabilité devant le peuple de Guinée implique un devoir moral d’une gestion effective du pouvoir, dans toute sa plénitude, pour enfin réussir le pari de la refondation et de la rectification institutionnelle.
En réalité, ce décret est du pain béni pour les futurs compétiteurs aux différents scrutins électoraux. Si besoin en était de rappeler, que les autorités de la Transition à tous les niveaux, ont décidé de s’auto exclure au compte des prochaines élections devant mettre fin à la Transition. Plutôt que de dénoncer, les acteurs politiques doivent être rassurés d’avoir des chefs de quartiers et districts neutres pour garantir un processus électoral transparent.
Aujourd’hui, le véritable enjeu est de fédérer les énergies pour conférer à ce processus transitoire, le succès escompté. Cependant, pour mieux édifier ceux qui peignent tout en noir, en ne voyant que du négatif partout, il est décliné plus bas les faiblesses de la Loi/2017/N°0039/AN et les avantages du décret du Président de la Transition consacrant la nomination des Chefs de quartiers et de districts par les Gouverneurs de régions.
I – Faiblesses de la Loi/2017/N°0039/AN portant Code électoral révisé de la République de Guinée :
– Manque de consensus des acteurs sociopolitiques autour de ladite loi ;
– Risques de politisation voire de communautarisation des populations à la base ;
– Le mode de désignation prévu par cette loi est une forme de nomination ;
– Le risque de désignation subjective des Chefs quartiers et districts par les états-majors des partis politiques, en déconnexion totale avec les volontés des populations à la base ;
– La loi était une faveur faite aux partis politiques de s’offrir les présidences des conseils de quartiers et districts.
II – Avantages pour cette Transition de procéder à la nomination des Chefs de quartiers et districts par les Gouverneurs de régions :
– Possibilité donnée à l’autorité centrale de nommer les Chefs de quartiers en se débarrassant d’un intérêt partisan quelconque ;
– L’intérêt général mis en avant puisque les autorités de la Transition ne sont candidats à rien ;
– Condition de crédibilisation du processus électoral en ce sens que les gestionnaires des élections au niveau local, ne sont pas redevables aux partis politiques. Ce sont des acteurs complètement neutres ;
– Moyen efficace de lutte contre la politisation des quartiers et districts pendant cette période exceptionnelle de la Transition.
III – Conclusion
Ce décret du Président de la Transition est un instrument pour une meilleure implémentation des politiques publiques des autorités de la Transition auprès des populations à la base. Il appartiendra toutefois au Conseil national de la transition, sous le leadership de son Président Dr Dansa KOUROUMA, de définir dans l’avant-projet de Constitution, les modalités de désignation des responsables de quartiers et districts, tout comme ceux des autres entités décentralisées et déconcentrées.
Boubacar Koela Diallo (journaliste).